Accompagner une personne jusqu’à sa mort, c’est aussi lui «fermer les yeux». Est-ce à dire que cette personne a sombré à tout jamais dans la nuit? En fait, nous n’en savons rien – et c’est dur de ne pas savoir ! Mais il est une voix intérieure qui nous dit:
Et comme les astres penchants / Nous quittent mais au ciel demeurent,
Les prunelles ont leurs couchants / Mais il n’est pas vrai qu’elles meurent.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux / Ouverts à quelque immense aurore,
De l’autre côté des tombeaux / Les yeux qu’on ferme voient encore.
Perdre un être cher signifie bien souvent être envahi par la tristesse, le désarroi ou la révolte. C’est aussi un moment où des décisions doivent être prises: avec qui allons-nous partager notre peine? voulons-nous nous faire accompagner, pour arriver à mettre des mots sur ce qui nous ébranle, pour trouver des symboles – des fleurs, un poème, de la musique… – qui pourront toucher et peut-être réconforter nos cœurs meurtris?
Aujourd’hui, en fonction des besoins et des convictions des proches, le cadre et le contenu des célébrations d’adieu s’est fortement diversifié. Pour qui demande des funérailles chrétiennes, il y a un grand nombre de textes et de rites qui peuvent offrir soutien et consolation. Ce qui leur est commun, c’est l’espérance que «de l’autre côté des tombeaux», les yeux qui se sont fermés s’ouvrent sur la rencontre d’un visage de lumière.
Référence: Sully Prudhomme, Les yeux (extrait), dans: Stances et poèmes, 1865