Jura Pastoral

François, un pape théologien… et géomètre

Pour le pape François, le polyèdre est préférable au cercle... | © Rostislav Uzunov/Pixabay Pour le pape François, le polyèdre est préférable au cercle... | © Rostislav Uzunov/Pixabay

Le pape François utilise fréquemment l’image du polyèdre pour expliquer sa perception de l’humanité, dans sa diversité qui combat l’uniformisation culturelle. Analyse d’un langage géométrique qui oriente vers une profondeur humaine et théologique.

Bernard Litzler, pour cath.ch

La Terre est ronde, mais le monde, lui, ne tourne pas toujours très rond. Le pape François le sait. Depuis plusieurs années, sa réflexion valorise une figure géométrique, le polyèdre (voire encadré). Est-ce dû à son diplôme de technicien en chimie, obtenu à Buenos Aires avant de rejoindre le séminaire?

Toujours est-il que l’actuel successeur de Pierre fait fréquemment allusion au polyèdre pour expliquer sa vision du monde. Le 21 novembre 2013 – année de son élection -, il explique dans un message vidéo pour le Festival de la Doctrine sociale de l’Eglise: «Il me plaît d’imaginer l’humanité comme un polyèdre, dans lequel les formes multiples, s’exprimant, constituent les éléments qui composent, dans la pluralité, l’unique famille humaine. C’est cela, la vraie globalisation! L’autre globalisation, celle de la sphère, est une homogénéisation!».
 

Garder son identité

Le polyèdre s’oppose donc à la sphère. En d’autres termes, l’uniformisation qui menace la planète – les mêmes références, séries TV ou boissons – s’oppose à la diversité, symbolisée par les multiples faces du polyèdre. 

Le 24 novembre 2013, le pape François reprend le symbole dans son exhortation apostolique La Joie de l’Evangile: «Quand une personne garde sa particularité personnelle et ne cache pas son identité, elle reçoit toujours de nouveaux stimulants pour son propre développement, écrit-il. Ce n’est ni la sphère globale, qui annihile, ni la partialité isolée, qui rend stérile».

«Pour le pape, tous, dans leur originalité, ont leur place dans le plan de Dieu»

Le pape justifie ainsi son choix: «Le modèle n’est pas la sphère, où chaque point est équidistant du centre et où il n’y a pas de différence entre un point et un autre. Le modèle est le polyèdre qui reflète la confluence de tous les éléments partiels qui, en lui, conservent leur originalité. Tant l’action pastorale que l’action politique cherchent à recueillir dans ce polyèdre le meilleur de chacun».
 

Unité et diversité

Les théologiens et les vaticanistes saisissent la portée de la réflexion «françoisienne», dans un sens politique: le polyèdre permet de penser à la fois l’unité du monde et la diversité des identités. En 2017, dans son livre-entretien avec le sociologue français Dominique Wolton (Politique et société, un dialogue inédit, Ed. de l’Observatoire), le pape complète: «On peut voir la globalisation comme un phénomène politique, sous la forme d’une «bulle» dont chaque point est équidistant du centre. Tous les points sont identiques et ce qui prime c’est l’uniformité: ce type de globalisation détruit la diversité», lance-t-il.

«Mais on peut aussi la concevoir comme un polyèdre, où tous les points sont unis, mais où chaque point, qu’il s’agisse d’un peuple ou d’une personne, garde sa propre identité. Faire de la politique, c’est rechercher cette tension entre l’unité et les identités propres».
 

Non à la lassitude

Garder son identité personnelle, ne pas devenir des numéros, uniformes. Cette insistance sur la personnalité de chaque personne, de chaque peuple, de chaque Eglise, François la reprend dans Fratelli tutti, son encyclique du 3 octobre 2020. «Il n’est possible d’accueillir celui qui est différent et de recevoir son apport original que dans la mesure où je suis ancré dans mon peuple, avec sa culture» (n° 143).

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